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Prendre le temps d’une visite à Bibémus

Les carrières de Bibémus à Aix-en-Provence respirent la quiétude ! À chaque fois que j’y vais, je comprends toujours mieux pourquoi Cezanne venait y peindre… On se sent en dehors du temps, à l’abri de la vitesse de l’homme, proche de la nature. C’est là-bas que je vous emmène aujourd’hui.

La vie de la pierre de Bibémus

Étant guide-conférencier, j’ai la chance de pouvoir ouvrir les portes des carrières de Bibémus aux visiteurs curieux d’en apprendre plus sur notre beau pays d’Aix. Bien souvent, mes chers hôtes viennent s’imprégner des paysages cézaniens. Ils viennent ressentir l’émotion cachée dans chaque arbre, chaque feuille et chaque effleurement rocheux qui a côtoyé le peintre et qui a, de fait, gardé un peu de son parfum. Ils ne seront pas déçus. Mais ce n’est pas là que commence le voyage…

Non, le voyage au cœur des carrières de Bibémus commence il y a plusieurs millions d’année, à l’âge du miocène. Je m’imagine alors dans ce paysage, complètement différent et où une mer chaude recouvrait les terres que nous arpentons lors de ces visites. D’ailleurs, en y regardant de plus près, la pierre est un véritable livre : dedans se dessine les coquilles des anciens animaux marins qui peuplaient le rivage. L’homme n’avait pas encore posé sa marque sur le lieu.

Pour cela, il faudra attendre encore quelques millions d’années et faire un bond dans le temps.

Des carrières qui ont façonné la ville d’Aix-en-Provence.

Bibémus est connu aujourd’hui pour avoir été un lieu d’inspiration pour Cezanne, mais il était connu bien avant pour la pierre qu’il fournissait à la ville natale du peintre. Car ici, je fais remarquer qu’on exploite la pierre depuis la fondation d’Aix-en-Provence. Et cela ne date pas d’hier ! En effet, Aquae Sextiae Salluviorum est la première fondation romaine de France métropolitaine ! Le nom même des carrières nous renvoie aux latins.

Je ne peux qu’imaginer la rudesse imposée aux carriers sur ce plateau où l’eau devait manquer. Est-ce pour cela qu’ils l’ont appelé Bibémus (nous buvons) ? Ou bien est-ce puisque, comme nous aujourd’hui, ils sentaient la porosité de la pierre lorsqu’ils l’effleuraient du regard et du doigt et la voyaient « boire » l’eau par ses nombreuses alvéoles ?

En tous les cas, la pierre de taille sera exploitée jusqu’au XIXe siècle. Elles parent les hôtels particuliers de la ville d’Aix-en-Provence, lui donnant du soleil même les jours de grisaille grâce à sa couleur ocre si particulière. Il y a quand même un défaut : la pierre est fragile. Je le remarque à chaque angle des rues de la ville. Lorsque la pierre de Bibémus s’use, elle s’émiette et redevient sableuse, comme si elle se souvenait de son enfance au bord de mer, lorsqu’elle n’était que coquille.

Au XXe siècle, l’exploitation reprend mais de façon sporadique. Elle ne durera d’ailleurs pas très longtemps. Aujourd’hui, plus aucun pic ne trouble la tranquillité de la nature. Enfin, sauf lorsque je ferme les yeux et m’imagine m’envoler vers d’autres époques. Seule ombre au tableau lors de ce voyage temporel : la nature ne devait pas être très présente. Heureusement, aujourd’hui, malgré le passage de l’Homme, elle a repris ses droits !

C’est à ce moment-là que Cezanne vînt.

De la pierre de Bibémus à la couleur de Cezanne

Je parle toujours de Cezanne en dernier aux carrières de Bibémus. Non pas que je le trouve moins important, au contraire. Mais plutôt parce que le voyage est aussi important que la destination. Je sais que les visiteurs viennent pour voir les lieux de Cezanne. Mais avant d’en parler, j’aime les faire voyager dans l’Histoire pour qu’elle prenne vie au-delà des mots. J’ai la sensation qu’ainsi, ils repartent avec plus que ce qu’ils sont venus chercher, les yeux égaillés et le sourire aux lèvres. Pourquoi ? parce qu’ils ont compris que Bibémus, ce n’était pas juste une carrière, où juste des paysages, mais l’Histoire de la Terre et des Hommes, l’Histoire d’un homme et d’une pierre.

Cezanne est donc venu à Bibémus pour peindre. Il gambadait déjà sur le plateau lorsqu’il était plus jeune mais c’est entre 1895 et 1904 qu’il y pose vraiment son chevalet. C’est donc, pour lui, la fin d’un voyage. Dans ses carrières, il peint 11 huiles sur toile et 16 aquarelles, pour ce qu’on en sait, qui vont diffuser un parfum de nouveauté dans l’art. Ce parfum chatouille les narines de bons nombres de ses contemporains, jusqu’à provoquer l’hilarité chez certains. Car oui, Cezanne était loin d’être apprécié à Aix de son vivant.

Je songe parfois à cette vie qu’il s’est forgé. Une vie à contre-courant, faites de conviction. Je n’ose imaginer la force qu’il faut parfois avoir pour résister contre vents et marées à la vindicte de ceux qui, choqués ou réfractaires à ces changements, n’ont pas su donner une chance à l’innovation. Trop avant-gardiste ? Peut-être. Que penserait Cezanne du cubisme qu’il a inspiré aux jeunes artistes du début du XXe siècle ? Et de l’art contemporain du XXIe siècle ? La plus grande beauté que je vois dans ces questions, c’est qu’elles n’auront jamais de réponses fermées… À moins d’inventer une machine à remonter dans le temps !

Toujours est-il que Cezanne vient chercher la couleur et la forme à Bibémus. Les ocres, les verts et les bleus vont structurer ces dernières tandis que les cubes, les cônes et les triangles vont contraster les couleurs. Il touchera ainsi du doigt sa propre perfection, l’alliance de l’une pour l’autre, la fusion des deux dans un univers qui privilégiait avant soit l’une soit l’autre. C’est peut-être là sa vraie révolution : la couleur et la forme sur un même plan.

Ici, pour y parvenir, il peint les rochers, les arbres et puis la montagne Sainte-Victoire. Véritable muse dans son œuvre, il la peindra 87 fois.

Il y a tant à découvrir à Bibémus que je vous conseille d’y aller. Ensemble si le cœur vous en dit, que nous partagions plus que des histoires, des paysages et des mots. Ensemble pour respirer un véritable moment de vie.

Informations pratiques :

Durée : environ 2 heures

Difficulté : Assez facile mais prévoir des chaussures confortables

Rendez-vous : Devant les carrières de Bibémus

Conditions d’accès : Entrée dans les carrières possible uniquement avec un guide-conférencier

Contacts : Secretsdici.fr // 09 71 33 57 96

Départ tous les mercredis à 18h d’avril à octobre (15€/pers.)

Départ tous les dimanches à 18h de juillet à septembre (15€/pers.) Visites privées à d’autres créneaux sur demande, toute l’année


Cet article a été écrit par : Arthur, guide-conférencier de Secrets d’ici
Crédits photos : Secrets d’ici

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